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Petites phrases et grandes idées
4 janvier 2012

Du traitement médiatique et politique des grèves

manifestation_CPEVous la connaissez, cette brave dame ? Evidemment que vous la connaissez, c'est toujours elle qui ouvre les sujets des JT consacrés aux grèves. Qu'il s'agisse des transports publics, de l'enseignement, des routiers, à chaque fois on peut la voir râler, avec son bon sens populaire et sa franchise de baby-boomeuse : "y'en a marre qu'une poignée de privilégiés prenne la France en otage". Ca y est ? Vous la remettez, la dame ? Parfois, c'est un homme. Parfois même, il ou elle est jeune. Mais toujours, toujours, c'est elle ou lui que l'on entend en premier.

Question très simple : a-t-on entendu les revendications des grévistes du personnel de sécurité des aéroports, durant les fêtes ? Sans doute. Les a-t-on autant entendues que les pauvres-vacanciers-qui-travaillent-toute-l'année-pour-se-payer-leur-voyage-au-ski-et-qui-sont-pris-en-otages-par-ces-salauds-d'irresponsables ? Si les médias, dans leur ensemble, voulaient étouffer les grèves, ils ne s'y prendraient pas autrement. La plupart du temps, la malhonnêteté intellectuelle n'est même pas de donner en priorité et en majorité la parole au "otages" plutôt qu'aux manifestants, mais plutôt de faire croire que comme ça, du jour au lendemain, quelques syndicalistes ont décidé de tout bloquer pour demander plus de pognon. Il arrive même d'entendre quelques experts de trottoirs pester qu'à l'étranger, non monsieur, non madame, ça ne se passe pas comme ça et qu'on négocie d'abord. Ah bon ? Alors, en gros, pour reprendre l'exemple du personnel de sécurité des aéroports, ces braves gens ont décidé d'un coup d'un seul d'arrêter de bosser sans prévenir personne ? "Petites phrases et grandes idées" a un scoop : dans ce cas précis, les négociations duraient depuis 7 semaines et, en réponse à la demande syndicale d'une augmentation de 200 euros par mois, la direction a proposé 20 euros bruts. Une insulte. Insatisfaits, les demandeurs ont donc envoyé un préavis de grève en bonne et due forme pour la période des fêtes, visibilité oblige. Tout le monde était donc prévenu. Et, pour la petite histoire, la grève a cessé après que la direction a accordé 400 euros de prime annuelle à ses salariés. Comme quoi le compromis existe, même chez les preneurs d'otage.

 

Quel écho pour les négociations fructueuses ?

 

Comme il a déjà été dit ici, la mauvaise foi a même poussé un ministre, il y a 4 ou 5 ans, à demander à ce que les jours de grève ne soient plus payés ! Naturellement, ils ne l'ont jamais été et, contrairement à ce que nombre de responsables politiques veulent faire croire, rares sont les grévistes qui prennent du plaisir à passer la journée à défiler sans toucher un sou. D'autant que ce genre de mouvement trouve très rarement un écho favorable dans l'opinion publique. Seulement voilà, certaines directions sont tellement rigides que seul un arrêt du travail permet de leur faire courber l'échine. Début décembre, par exemple, des syndicats du rail ont annoncé une grève pour la période des fêtes. Pendant deux jours, les journaux ont ouvert sur une simple annonce avant qu'évidemment, un accord ne soit rapidement trouvé. Une pression exercée intelligemment peut passer inaperçue.

Chaque année, des dizaines et des dizaines de revendications syndicales trouvent une oreille positive. Dans ces cas, ni grève ni cortège ne sont nécessaires. Le tout se passe entre gens de bonne intelligence. Seulement, il n'y a rien de télégénique là-dedans. Alors on se concentre sur le conflit et les syndicats seraient des irresponsables qui passent leur temps à faire grève et qui ne travaillent jamais. Si c'est le cas, ils ne sont donc jamais payés. Le reste du cheminement intellectuel coule de source.

Certains plaident pour un durcissement des conditions du droit de grève. D'autres prônent des méthodes alternatives, comme de laisser les usagers prendre les transports gratuitement. Rarement les manifestants auront été si détestés qu'actuellement. Que des étudiants défilent dans les rues, et 70% de la population sera derrière eux. Mais si, ne serait-ce qu'une journée, les conducteurs du métro cessent le travail, et c'est l'ensemble des travailleurs qui hurleront à la "prise d'otage". Alors quand la bonne dame ou le jeune homme pestent en ouverture du 20 heures en affichant ouvertement leur individualisme, les "tous ensemble, tous ensemble" des grévistes résonnent avec d'autant plus de poids. Il suffit d'être bien informé pour en prendre conscience.

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Commentaires
M
joli papier sur ce qu'est une grève. d'autant plus quand le ministre de tutelle fait le sourd. d'où une nouvelle grève dans l'éduc nat le 31 janvier. encore....
B
Bravo! j'aurais dit pareil!! à quand une ouverture d'info télé sur une grève , ouverture qui fasse l'exposé de la situation , avec de jolis schémas au besoin en couleur, pour égayer le propos..mais le temps n'est plus collectif, crevons chacun , individuellement, tout seul!!! et il n'y aura plus de monde à sauver..
Petites phrases et grandes idées
  • Une petite lanterne, sans prétention, pour éclairer la politique et ceux qui la font. A mi-chemin entre le prestige de la fonction et le ridicule de certains débats, il y a tout un monde à passer au crible...
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