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Petites phrases et grandes idées
5 avril 2012

De la différence entre un petit et un grand candidat

petit-et-grand-t11509On l'a bien vu durant toute cette campagne, le monde des candidats à la présidentielle se divise en deux camps : ceux qui comptent et les autres. Ces derniers temps, "Petites phrases et grandes idées" a beaucoup tapé sur les médias. Et, en l'occurence, il serait totalement injuste d'insinuer qu'ils ont une part de responsabilité dans le fait que tous les candidats en soient pas égaux dans l'esprit des électeurs. Car en réalité, c'est entièrement de leur faute. Une telle accusation demande des preuves.

La question est de savoir ce qui rend, par exemple, Nicolas Dupont-Aignan moins crédible que Nicolas Sarkozy. Ou d'expliquer pourquoi Philippe Poutou est moins à-même de mener une révolution dans ce pays que Jean-Luc Mélenchon. La réponse première est très simple : les sondages. Quand ils créditent un candidat de 15% et l'autre de 2%, l'opinion publique va naturellement s'intéresser de plus près au mieux loti. Mais si l'on s'intéresse de plus près à la question, on constate une donnée fondamentale : les électeurs sont affreusement mal informés sur le programme des candidats. En dehors de deux ou trois mesures sorties d'un contexte ou d'accusations des adversaires, le Français de base ne connaîtra d'un prétendant que ce que les médias voudront bien dire de lui. Et, en général, cela se limite à quelques bribes d'informations tellement rabâchées à longueur d'éditions que même les plus ouverts d'esprit auront un mal fou à se défaire de ces lieux communs. Mais avant de s'y intéresser, il convient de préciser quelques chose. Un petit candidat n'aura pas et n'aura jamais le même traitement médiatique qu'un grand, même en période d'égalité du temps de parole. Exemple : Philippe Poutou est invité au 13 heures de France 2, la merveilleuse Elise Lucet lui lance : "pourtant, on dirait que vous n'avez pas la gagne". Aurait-elle osé une question aussi incisive face à Mélenchon, Sarkozy ou Hollande ? Toujours Philippe Poutou, invité de "la Matinale" de Canal + explique à quel point selon lui, depuis 20 ou 30 ans, la France a été gérée avec les pieds, y compris durant le gouvernement socialiste de Lionel Jospin. Question immédiate de la journaliste : "donc si la France va mal, c'est la faute de François Hollande ?" Défense de rire de la bêtise affolante de l'intervieweuse. Voilà on aura donc compris les deux mantras des médias face aux petits candidats : on les bouscule et on les prend pour des jambons.

 

Idées reçues et absence de respect

 

Mais revenons à nos lieux communs. Ces informations isolées que les médias ont rabâchées sur tous les candidats durant l'ensemble de la campagne et qui, immanquablement, marquent les esprits au point de ne pas pouvoir être contestées. La question n'est pas de savoir si elles sont vraies. Mais les candidats sont bien plus que deux ou trois stéréotypes.

Prenons François Bayrou. Le type hurle à qui veut l'entendre, et depuis dix ans, qu'il faut réduire les dépenses publiques et se consacrer sérieusement au problème de la dette. A-t-on entendu cette information durant la campagne ? Qu'il est isolé, qu'il est en baisse par rapport à 2007, qu'il ne sait pas vers qui pencher pour le second tour, tout ça on le sait, on l'a entendu encore et encore. Mais pour les vraies infos, sur son programme entre autres, il faudra repasser.

Le pire cas est sans le moindre doute celui d'Eva Joly. 95% du temps qu'auront passé les médias à parler de la candidate verte aura tourné autour du thème "doit-elle continuer ou pas ?" Et tant pis pour son intégrité, ses alertes écologiques, sa volonté de sortir du nucléaire. Ah oui, elle est tombée dans un cinéma aussi. Le prix du plus grand foutage de gueule médiatique de l'année revient sans aucun doute à la couverture de la campagne de l'ex-miss Norvège. Oui, car ça aussi on le sait. A ce titre, et si vous doutez encore du manque de respect accordé à Eva Joly, vous êtes cordialement invités à jeter un oeil à la tribune du fils de la candidate sur Rue89 ici.

On a vu à quel point Philippe Poutou a pu déguster durant ces derniers mois. Le candidat du NPA n'en finit pas d'être bizuté et c'est encore plus grotesque lorsqu'on voit avec quel respect on traite Olivier Besancenot qui, lui, aurait été un candidat sérieux. Nathalie Arthaud subit le même sort et les deux questions qui lui sont le plus souvent posées restent "n'est-ce pas trop dur de succéder à Arlette Laguiller" et "pourquoi vous continuez alors que vous n'êtes qu'à 1% ?" Pathétique.

Jacques Cheminade réussit un exploit : celui d'être candidat mais de devoir systématiquement parler de quelqu'un d'autre. En l'occurence le fameux Lyndon LaRouche, l'homme politique américain qui a déguisé Obama en Hitler. Certes, il ne s'agit sans doute pas du meilleur modèle, mais peut-être y aurait-il d'autres questions à poser à un homme qui, malgré son côté loufoque et peut-être même dangereux, a réussi à séduire 500 élus.

Enfin, Nicolas Dupont-Aignan souffre d'un mal bien différent. Comme il est un homme politique professionnel, on ne cherche pas à insister sur son originalité. Il n'en a pas. Là où les autres petits candidats vont devoir subir systématiquement les mêmes interrogatoires, infiniment éloignés de leurs programmes, le boss de Debout la République, lui va avoir le droit de dérouler ses idées. Mais, et notez bien ce point, ses intervieweurs se moquent totalement de ce qu'il dit. Plus peut-être que pour tout autre candidat, Dupont-Aignan n'amuse pas les médias. Il est chiant, sérieux, convaincu qu'il est investi d'une mission. Pas un bon client.

A côté de ça, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon, François Hollande et Nicolas Sarkozy doivent, eux aussi, faire face à des idées reçues bien ancrées, mais ils intéressent bien plus les médias, totalement guidés par les sondages. Même si François Hollande ne peut, apparemment, pas financer son programme. Même si, à en croire les ondes, Nicolas Sarkozy est le Président des riches. Même si, tout le monde en conviendra, Marine Le Pen risque d'aller au second tour. Même si, chaque journal vous le dira, Jean-Luc Mélenchon fait peur à François Hollande. Malgré tout cela, le traitement médiatique reste à deux vitesses. Et, pire, le respect médiatique n'est pas donné à tout le monde. Le risque, on le connaît, est de connaître une diminution inexorable du nombre de candidats et de partis jusqu'à, éventuellement, arriver au bipartisme américain. Après tout, si le second tour est déjà dessiné, pourquoi s'ennuyer à en faire un premier. Surtout si ça ennuie profondément les médias...

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Commentaires
B
à la question posée par les nouveaux chiens de garde ou qui se pose quand on écoute leurs débats : les médias choisissent -ils les candidats , font-ils les élections , question fondamentale pour l'existence de la démocratie étant une "branchée " sur l'info " presque en continu , je ne puis que constater à quel point les phrases entendues et répétées à satiété sur les ondes resurgissent automatiquement à l'esprit lorsqu'un sujet de campagne revient et évidemment elles couvrent les quelques positions des "petits candidats" à peine entendues. Finalement cela ressemble à un lavage de cerveau , les chiffres des sondages nous sont enfoncés dans le cerveau avec insistance et là tous les médias sont de la partie , il n'y a plus d'échappatoire . on peut aussi constater de part le "tri" des spécialistes , sélectionnés par les journalistes, quels types de raisonnements "économicopôlitiques" nous sont présentés comme favorables, le ton utilisé et le questionnement nous enjoignent de qualifier les uns et les autres d'intelligent ou de stupide , il faut être très vigilant pour avoir un minimum d'objectivité<br /> <br /> je ne suis pas adepte de la théorie du complot , mais force est de constater que la parole semble confisquée par un groupe d'informateurs qui construisent en continu une dramaturgie: ça fait vendre..il faut du suspens quitte à le fabriquer .Bien difficile à un journaliste de faire entendre une voix originale . Il faut être dans le "bon sens ".Faire une cure de silence et d'images quelques jours avant d'aller voter..
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  • Une petite lanterne, sans prétention, pour éclairer la politique et ceux qui la font. A mi-chemin entre le prestige de la fonction et le ridicule de certains débats, il y a tout un monde à passer au crible...
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