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Petites phrases et grandes idées
16 mars 2012

De l'extrême gauche et sa mutation récente

poing_leve_rapide-878a7On a tendance a l'oublier, mais le gros noyau politique qui a subi le plus grand bouleversement durant ces dernières années est l'extrême-gauche. L'extrême-droite reste à la main des Le Pen, Sarkozy a changé un parti de libéraux gaullistes en un parti de libéraux tout court, Bayrou ne bouge pas vraiment et François Hollande est dans la plus parfaite continuité du parti qu'il a dirigé pendant 10 ans. Rien de bien nouveau dans le paysage politique, donc, à la très notable exception de l'extrême-gauche.

Il y a 5 ans, Besancenot menait la marche, Laguiller ratait son baroud d'honneur, Buffet disparaissait, José Bové prenait une sacré raclée et Gérard Schivardi faisait rire. Cinq candidats pour un total cumulé de moins de 10%. A comparer avec l'élection "ratée" de Le Pen père, qui atteignait à lui seul un score à deux chiffres. Mais il est désormais communément admis qu'un bon tiers des ouvriers votent FN. Au début du quinquennat qui se termine, l'extrême-gauche était donc en deshérance totale, puisque Nicolas Sarkozy avait en plus gagné avec une campagne résolument à droite. Minée par ses divisions, lâchée par ses leaders, on ne donnait pas cher de la peau des rouges. Et pourtant...

Plusieurs choses fondamentales ont permis à la gauche de la gauche de se refaire une petite santé. Oui, petite, parce qu'il faudrait pas voir à exagérer non plus. Derrière la retraite d'Arlette Laguiller et la prise de recul d'Olivier Besancenot, certains partis ont dû se trouver des leaders. Cela vaut aussi pour le Parti communiste, dont Marie-George Buffet n'a jamais su être une capitaine de route. Mais l'extrême gauche a su profiter de deux circonstances éminemment favorables dans son processus de reconstruction. La crise d'abord, bien sûr, avec les dérives du capitalismes outranciers mises à nu. Et puis, plus surprenant, si les tendances révolutionnaires, trotskistes ou encore communistes sont aujourd'hui plus vives qu'il y a cinq ans, elles le doivent en immense partie au... Parti socialiste !

 

L'OPA de Mélenchon

 

Une chose est sûre, le PS a enfin su voir dans son extrême le plus proche une cagnotte dans laquelle puiser, comme la droite ne se prive pas de le faire. Et après l'échec de Ségolène Royal, un évènement a "regauchisé" le PS avec une efficacité redoutable : le congrès de Reims. On le croyait gravé dans l'Histoire pour les soupçons de magouille de Martine Aubry, il pourrait également être le point de départ du réveil de l'extrême-gauche. Il y a d'abord eu le score étonnant de la motion portée par Benoît Hamon, bâtie sur les cendres du Nouveau Parti socialiste et en association avec la gauche du PS. Et puis, évènement d'abord anecdotique mais finalement décisif, le départ de Jean-Luc Mélenchon. Officiellement lassé par la ligne politique de son parti, officieusement désireux de saisir sa chance, le leader du Front de Gauche a ainsi fait son coming-out révolutionnaire et ne traîne plus, aujourd'hui, son passé de socialiste comme un boulet.

Dès lors, les choses vont s'accélérer. Ultra présent lors de la campagne des européennes de 2009, Mélenchon va complètement couper l'herbe sous le pied de Besancenot et de son NPA en construction. En le faisant à celui à qui l'on prédisait une hégémonie totale sur l'extrême-gauche, Mélenchon a réalisé une OPA sur les militants à gauche du PS. On le constate aujourd'hui : l'opération a pleinement porté ses fruits. Et si Besancenot a finalement préféré ne pas se présenter cette année, nul doute que la présence annoncé du leader du Front de gauche y est pour quelque chose. 

Le PS va encore donner un coup de pouce à l'extrême-gauche, par le biais d'Arnaud Montebourg. A la manière de Benoît Hamon à Reims, il va porter une ligne très révolutionnaire, axée sur la fameuse "démondialisation". Or, ce genre de positionnement est tout à fait à même d'apporter de l'eau au moulin du NPA, du PC, de LO et, bien sûr, de Mélenchon. Et, toujours comme Hamon à Reims, il va atteindre un score inespéré. Les deux exemples montrent bien que le PS ne serait pas nécessairement perdant s'il venait à adopter un virage plus à gauche. Mais l'adage dit qu'une élection se gagne au centre et il ne se trouve personne pour oser le contredire.

Dernier fait marquant de cette refonte de l'extrême-gauche : la disparition du Parti communiste. Son secrétaire général, Pierre Laurent, est un inconnu absolu et, en désespoir de cause, les militants ont voté le soutien à Jean-Luc Mélenchon pour la présidentielle. Pas de candidat communiste cette année ! Presque impensable, mais finalement inéluctable lorsque l'on observe les scores électoraux du parti depuis la fin de l'ère Marchais.

Un mot sur Lutte ouvrière qui a bien du mal à passer le cap de la retraite d'Arlette Laguiller. Cette dernière a connu les plus grandes difficultés en 2007 et on imagine mal Nathalie Arthaud redresser la barre dès cette année. L'avenir semble bien sombre pour le parti réputé pour être le plus à gauche de l'échiquier politique français.

Donc, qu'en est-il aujourd'hui ? L'extrême-gauche dispose d'une configuration proche de celle des autres composantes de la politique française à savoir un parti hégémonique et d'autres, plus petits, qui le considèrent avec plus ou moins de sympathie. Là où, en 2007 comme en 2002, se multipliaient les candidatures similaires de micro-candidats se battant autour de 2%. Désormais, la locomotive Mélenchon est lancée à pleine vitesse, disposée à soutenir Hollande au second tour, liguée avec le PC et ouverte au dialogue avec le NPA. Pas si mal pour un homme qui, il y a quatre ans, était un sénateur socialiste parmi les autres...

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  • Une petite lanterne, sans prétention, pour éclairer la politique et ceux qui la font. A mi-chemin entre le prestige de la fonction et le ridicule de certains débats, il y a tout un monde à passer au crible...
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