Des raisons qu'a Nicolas Sarkozy d'encore y croire
Après la semaine qu'a passée François Hollande sur son nuage et la soirée plombante que plus de 16 millions de personnes ont passée devant le Président, un constat s'impose : le candidat socialiste a un boulevard devant lui. Et Martine Aubry a beau tempérer les ardeurs et rappeler sur RTL que "rien n'est jamais gagné d'avance", le PS peut se frotter les mains et envisager des lendemains qui chantent. Car, sauf grosse erreur de sa part, il est quasiment assuré de revenir au pouvoir. Après 17 ans hors de l'Elysée et 10 ans hors de Matignon, la gauche peut-elle commencer à choisir son papier peint ? Pas si sûr. L'UMP a beau arguer que le favori de janvier est rarement le vainqueur en mai, les raisons d'espérer sont maigrichonnes. Cependant, elles existent et "petites phrases et grandes idées", en bon blog politique qu'il est, va essayer de donner un peu d'intérêt à une élection qui en manque cruellement.
Tout d'abord, il ne faut jamais enterrer un Président sortant. Dans toute l'histoire de la Ve République, seul Valéry Giscard d'Estaing a quitté l'Elysée sur une défaite. Curieux hasard : son septennat a été marqué par une crise économique. Cependant, si François Mitterrand et Jacques Chirac ont été réélus, il convient d'en tenir compte. L'un et l'autre faisaient face à une popularité en berne, mais ont su capitalisé sur leur expérience du pouvoir pour rempiler pour un mandat. Nicolas Sarkozy va jouer à fond la carte de la stature et de la responsabilité. Si l'opinion publique est prête à entendre ce genre d'arguments, il faudra compter avec le sortant. Malheureusement pour la droite, ni Chirac ni Mitterrand n'avaient un bilan et une côte de popularité aussi catastrophiques.
Et puis, Nicolas Sarkozy, c'est avant tout une incroyable machine à gagner. Un rhéteur de premier ordre, un excellent débatteur, un animal politique au sens affûté. Sa carrière est émaillée de gros ratés, mais tout cela ne rend sa victoire de 2007 que plus brillante. L'homme sait mener une campagne et son entourage, pitoyable pour diriger l'Etat, devient curieusement compétent dès qu'il s'agit de glaner du suffrage. Sans doute se subliment-ils sous la pression... L'UMP est consciente de n'avoir que Nicolas Sarkozy à envoyer devant les Français. Aussi le parti est-il à 100% derrière son chef et il serait curieux de voir une tête dépasser durant la campagne. S'il n'est clairement pas favori, le Président sait au moins pouvoir compter sur des troupes en ordre de marche.
Rebondir ou creuser ?
Autre élément sur lequel Sarkozy peut compter dans sa campagne à venir : un positionnement très large. Au moment de dresser le bilan de son mandat, les observateurs ne manqueront pas de pointer sa dureté idéologique. Expulsions d'immigrés, coups de trique sur le service public, expressions verbales choquantes... Or, économiquement, Sarkozy ne s'est pas montré plus libéral que ce à quoi l'on s'attendait. Et il tend même à se recentrer, la présidentielle approchant. Il lui reste donc une marge large, à droite sur l'économie, au centre sur le social. L'UMP, contrairement au PS, n'a pas d'alliés politiques susceptibles de faire pression sur son positionnement. Libre à Nicolas Sarkozy de proposer une taxe Tobin, une régularisation de sans-papiers ou une nationalisation du Crédit Agricole. Personne ne viendra lui demander des comptes, sinon les électeurs. Quel que soit le résultat de l'élection, il sera seul maître à bord et donc seul responsable. L'avantage est qu'il a les coudées franches. L'inconvénient est qu'il paiera les pots cassés seul en cas de débâcle.
Enfin, c'est un paradoxe, mais le Président ne peut que se réjouir d'être si bas aujourd'hui. Comme disent les anciens, il y a deux manières de réagir quand on est au fond du trou : ou on rebondit, ou on creuse. Actuellement, les sondages s'accordent pour dire qu'Hollande flirte avec les 30% au premier tour et que Sarkozy est entre 20 et 25. Or, on parle d'un Président qui se débat avec une crise, qui dispose d'une côte de popularité lamentable, qui exaspère la Terre entière et dont l'entourage est composé de pseudo-fascistes, de déficients mentaux et de beuglards idiots. Tout ceci est extrêmement positif ! Etre à 20% dans les sondages dans ces circonstances, cela signifie que si demain, le candidat Sarkozy multipliait les gaffes, divorçait, perdait le deuxième A et privatisait l'Education nationale, il aurait quand même 20% de suffrages assurés ! Alors avec une campagne bien menée, et on peut lui faire confiance là-dessus, son potentiel électoral ne peut que monter.
Oui, bien sûr, tout ceci est bien maigre. Nicolas Sarkozy, s'il venait à être battu en avril ou en mai prochains, resterait dans l'Histoire comme l'un des pires Présidents de la Ve République. François Hollande, on l'a dit, est sur un nuage actuellement et sa position lui permet de contrôler les choses, des thèmes au timing. A priori, si la logique est respectée, le socialiste l'emportera facilement en mai prochain, après une campagne menée piano, sans forcer car il n'en a nullement besoin. Mais enterrer Sarkozy tout de suite serait une erreur et, si minces que soient ses chances, le Président sortant a toujours une belle carte à jouer. Une toute petite.